Aujourd’hui, nous allons parler des Zèbres. Hum Audrey, pourquoi parler de ces animaux à rayures ??  Et d’autant plus sur un site de dessin…

Alors, si vous n’avez jamais entendu parler des zèbres, vous avez peut-être entendu parler de Haut Potentiel ou encore de précoces ou surdoués.

On entend de plus en plus parler de telles dénominations.

Beaucoup d’étiquettes mais quelles nuances ? Et au final quel intérêt ?

Dans un premier temps, essayons d’y voir plus clair dans toutes ces appellations.

Certains s’y reconnaitront et cela les aidera, je l’espère, à ne pas se sentir trop en marge.

Une fois que nous aurons fait davantage connaissance avec ces drôles de zèbres, je vous parlerai de leur attrait pour le dessin. Enfin, Pit partagera avec nous son expérience!

 

Différentes appellations pour parler de potentiel

Les différentes appellations de haut potentiel, précoces ou encore surdoués font référence à une façon différente de voir les zèbres.

Alors que le terme précoce fait référence au développement de l’enfant en avance, la notion de douance ou de haut potentiel le voit plutôt du point de vue du don.

A titre personnel, je préfère le mot zèbre qui n’induit pas d’idée de supériorité ou de don mais uniquement de différence.

La 1ère question à se poser est : “vous êtes-vous souvent sentis différents, en marge, incompris, d’un autre âge ?”

 

illustration d'un Personnage se posant des questions

 

Ce concept de zèbre se définit en premier lieu par rapport à la norme, la majorité.

Ce décalage peut se retrouver dans différents domaines :

  • dans la famille: les parents peuvent se sentir désemparés avec un enfant qui va très vite, qui argumente beaucoup et qui est très sensible (ne supporte par les bruits trop forts, les étiquettes qui le grattent…)
  • Avec les copains : les centre d’intérêt ne sont pas les mêmes, il peut avoir envie de conversations de “grands”, avec un vocabulaire souvent plus étendu et des remarques d’un autre âge.

 

Et il est souvent difficile de profiter du moment présent, de lâcher prise quand on est en décalage, quand on n’a pas le bon tempo par rapport aux autres.

Que vous imaginez-vous comme image type d’un haut potentiel ? Un enfant à lunette qui s’ennuie à l’école, à qui on a proposé de sauter une classe ou bien qui a de mauvais résultats, qui reste seul, dans son monde imaginaire avec les petits camarades qui se moquent de lui….

Ok, ok. Maintenant, quittons les séries américaines et explorons les différentes rayures que peut revêtir le zèbre ;)

Vous allez voir que les nuances, les formes, couleurs et intensités sont vraiment multiples.

Pour commencer, un mythe à tuer dans l’œuf est que le critère discriminant est le QI. Les zèbres peuvent avoir un haut potentiel dans des domaines autres que l’intellect au sens logique du terme.

Il y a de nombreux autres types d’intelligence comme nous l’explique le psychologue Howard Gardner :

 

Différentes types d'intelligence selon Gardner

 

Caractéristiques de ces intelligences

Ok, mais du coup, les zèbres ont-ils d’autres points communs ?

 Les caractéristiques ci-dessous, même si elles sont incomplètes, donnent déjà de bonnes indications.

Illustration Caractéristiques

De façon générale, le mot zèbre caractérise les personnes atypiques, peu comprises, avec un mode de pensée différent de la majorité.

Leur intelligence intuitive aiguisée dissèque et analyse leur environnement en permanence. Leur réceptivité émotionnelle est exacerbée. Ces 2 caractéristiques font qu’ils sont généralement dotés d’une grande lucidité.

Cette différence est à la fois un cadeau mais peut aussi les fragiliser, affecter leur confiance en eux notamment, voire les faire souffrir si elle n’est pas comprise par l’environnement.

Le zèbre est persévérant, engagé dans ce qu’il entreprend, il verrouille ses objectifs et fait preuve de détermination et d’endurance.

Les questions métaphysiques, les questions sur le sens de la Vie le passionnent. Et il cherche des réponses avec détermination ! Son intelligence lui permet de trouver des détails que tout le monde ne voit pas et cela peut éventuellement se traduire par un QI élevé. 

C’est le sens de ses actions qui l’anime, l’amélioration du bien-être de l’humanité. Le pouvoir, il s’en fout ! 

En ce qui concerne sa façon de penser, quel que soit le ou les types d’intelligence qu’il affectionne le plus, son cerveau est en ébullition permanente avec une multitude de connexions neuronales, d’associations et une pensée en arborescence. Sa grande capacité d’analyse systémique lui permet de faire des liens entre différents domaines ou idées. Il voit, il associe, il fait des liens, il détecte des schémas, des modèles, il confronte et réorganise les idées.

Cette pensée à rebond offre un champ des possibles infinis, parfois difficile à canaliser, et encore plus à expliquer. Le zèbre prend souvent des raccourcis dans l’expression de sa pensée en donnant le résultat directement.

En tout cas, si quelqu’un invente l’enregistreur à pensées, je peux vous assurer qu’il y a un marché ;)

Et bien sûr, cela alimente sa curiosité insatiable et sa créativité (pour les enfants, les amis imaginaires ne sont pas rares!!). Autant vous dire que le zèbre a besoin de nouveauté, de changement, d’absorber de nouvelles connaissances sur les sujets qui le passionnent. Et il aime passer d’un sujet à un autre !

 Le zèbre est un être particulièrement sensible voire hypersensible, qui pense d’abord avec ses émotions. C’est un atout qui lui permet de détecter facilement les émotions, les ambiances, et de s’adapter. En revanche, c’est beaucoup de contrôle pour ne pas se laisser submerger par ses émotions.

 Il est sensible aux détails ainsi qu’à l’esthétique et la Beauté des idées et des choses.

Cette sensibilité couplée à la valeur “engagement” en font des êtres d’une grande loyautéfidélité et d’une sens aiguë de la justice. Ce sont des valeurs communes fortes !

Mais tout n’est pas rose et à chaque médaille il y a un revers.

Sa capacité à capter les émotions environnantes et sa capacité d’analyse en continu font qu’il scanne son environnement en permanence, ce qui ne lui laisse pas de répit.

Souvent frustré et équipé de cette super lucidité, il est confronté à la réalité et à ses limites, il se sent souvent impuissant et en dessous de l’idéal qu’il aimerait atteindre, jamais à la hauteur. Il est donc souvent taraudé par une peur viscérale de l’échec dans sa capacité à mettre en œuvre sa vision, à se réaliser, malgré les capacités dont il est doté; et cette angoisse est tellement envahissante!  La peur est omniprésente chez cet animal à rayure qui s’inquiète pour les autres à commencer par ses parents pour qui il ne veut pas être une source d’inquiétude.

L’enfant intérieur est très présent, même s’il le cache bien. Pas facile de laisser s’exprimer cette partie de soi souvent sujette à moquerie. Il s’agit de sa capacité à s’émerveiller, à donner, à être connecté à ses émotions. De l’autre côté de la médaille, le zèbre peut osciller entre un côté Calimero (qui se plaint pour ceux qui ne connaissent pas le personnage ;)) et ou sentiment de toute puissance, 2 extrêmes infantiles. Dans ce cas, les causes de ses problèmes sont à l’extérieur et il a tendance à ne pas prendre sa part de responsabilité dans ce qui lui arrive.

Pour se balader dans ce spectre de réactions, il est équipé d’un enthousiasme communicatif !

De manière assez paradoxale, du fait de sa grande sensibilité et de sa capacité d’analyse très développée, il contrebalance sa facette infantile avec son côté “vieille âme”. On parle alors d’hyper maturité. Cela occasionne souvent un décalage important avec l’entourage, notamment à l’école. Un mécanisme de protection peut alors être de limiter son vocabulaire, s’adapter et agir comme les autres. Il sait s’adapter à son environnement et est capable d’ajuster son comportement tel un caméléon. C’est là qu’arrive le risque de se perdre…

Côté humour aussi, le décalage se fait sentir, souvent noir, cynique ou à l’inverse très enfantin…

Vous cernez un peu mieux l’animal maintenant ? Bien-sûr, c’est le regroupement de ces caractéristiques et leur intensité qui font les rayures.

 

Quel rapport avec le dessin?

Illustration personnage ouvrant une trousse

 

Parmi les caractéristiques du zèbre, nous avons parlé de l’imagination débordante (enfant souvent “dans la lune”), de la grande créativité, du sens artistique développé, de nombreux centres d’intérêt, d’une grande capacité d’observation, et d’une bonne dose de perfectionnisme. Humm.. De bons ingrédients pour un artiste, non ?

En croisant cela avec le fait que ses sens sont en alerte et qu’il est réactif aux stimuli sensoriels, il n’est pas étonnant que l’art et en l’occurrence l’art traditionnel attire les zèbres.

Certains zèbres ont même une capacité particulière pour enrichir leur créativité : la synesthésie ? Ce mot vient du grec syn (ensemble, union) et aesthesis (sensation).

Il s’agit d’un phénomène neurologique par lequel deux ou plusieurs sens sont associés.

Le synesthète associe involontairement et spontanément des perceptions sensitives entre elles alors qu’elles n’ont pourtant pas forcément de lien apparent.

Il y aurait jusqu’à 4 % de synesthètes dans la population. Exemples : associer des formes et des gouts (boire de l’eau “ronde” ou “carré”) ou encore des chiffres et des couleurs.

Tout ce qui touche aux cinq sens peut être concerné. Les perceptions synesthésiques ont une charge émotionnelle. On peut considérer la synesthésie comme une forme d’hypersensibilité.

Les synesthètes se retrouvent souvent chez les zèbres.

Alors oui, le zèbre est bien équipé pour le dessin. Et en quoi cela peut-il lui plaire ?

Comme j’aime à le rappeler, le dessin est avant tout un dessein. C’est donc une histoire d’association entre une idée, une intention et sa matérialisation.

Là, les liens commencent et c’est parti pour cet incroyable voyage dans les associations d’idées…un univers de recherche et de liberté où l’on peut faire fi des conventions. Les normes, nous les inventons !

La page blanche peut être difficile au départ car le dessin implique une réalité matérielle. Il faut donc faire des choix dans toutes ses idées. Cela peut être frustrant mais c’est aussi l’occasion de se positionner, de créer dans la réalité.

En dessinant, on est face à sa feuille et à soi-même. C’est un moment où on peut laisser place à son monde intérieur. Souvenez-vous, il est compliqué pour le zèbre d’expliquer tout le cheminement de sa pensée puisqu’il est parti dans différentes directions et a fait des associations d’idées.  Eh bien le dessin permet d’offrir une synthèse, un résultat sans obligation d’explication.

Je pense que ce qui caractérise le dessin, c’est bien la liberté qu’il procure, ce dont le zèbre a grandement besoin ! La création artistique, c’est à la fois :

Un bon moyen d’identifier et exprimer ses idées, ses émotions, ses envies et ses sensations sans jugement des autres et sans nécessairement passer par le verbal

Et un moyen de créer dans la réalité, de donner du sens, de se connecter à son corps.

Par ailleurs, le dessin peut aussi être vu sous l’angle méditatif qui oblige le zèbre à débrancher sons cerveau. Vous savez, c’est comme quand on se concentre sur sa respiration. Eh bien là, on se concentre sur ce que l’on fait, sur la technique, ce qui permet de faire ralentir le vélo mental. Se concentrer sur ces sensations permet paradoxalement de faire plus de place à son intuition et donc à qui il est. Il se rapproche alors de ses questions métaphysiques, et ça, ça fait du bien!

J’ai également envie de vous parler du rôle  du symbole, de la représentation des archétypes qui, comme dans le voyage du héros de Joseph Campbell, participent à une transformation de l’individu. Bref, dessiner ses héros de BDs préférés, c’est en fait travailler sur soi et se transformer ;)

 

L’évolution du zèbre – Comment gérer ce décalage?

Au fur et à mesure de son évolution, le zèbre va mettre en place des mécanismes d’adaptation.

Cela commence dès l’école où l’échec scolaire peut se faire sentir pour cause de rêverie, ennui ou hyperactivité, caractère répétitif des exercices, difficulté à argumenter sa pensée, refus de l’autorité…

Le zèbre pourra alors s’enfermer dans une marginalisation ou bien développer une sur-adaptation (scolaire, émotionnelle, sociale…), un faux self, avec le risque de se perdre…

Dans un environnement où il n’est pas compris, il y a de forte chance pour que le petit zèbre perde confiance en lui et devienne timide. Il se peut même que l’on juge ses prises de parole comme hautaines, manquant de modestie ce qui le confortera dans son envie de se conformer à ce que l’on attend de lui (et ça, il le capte vite!!). La fameuse désirabilité sociale…

A l’inverse, il peut développer son ego, jouer le jeu de l’étiquette qu’on lui colle, et apparaitre comme suffisant voire méprisant.

Dans son livre “trop intelligent pour être heureux”, la psychologue Jeanne Siaud-Facchin parle de différentes typologies permettant de se situer un peu (sachant que rien n’est définitivement figé..). Parmi ces typologies, il y a :

“ceux qui acceptent le cadre, en développant une résilience par rapport au système en place ainsi qu’une adaptation (attention à la dépression!)

ceux qui challengent et consacrent toute leur énergie à se dépasser, faire avancer leurs idéaux. Ils semblent inarrêtables, forts. Ils sont souvent également très anxieux de ne pas voir leurs idéaux se réaliser et cette suractivité tente de combler cette anxiété.

ceux qui se confrontent au cadre (les rebelles en quelque sorte): le refus du cadre avec les 2 revers de la médaille: un pouvoir de création mais aussi de la colère et de la frustration omniprésentes. Bien sur le tout avec des degrés différents, rien n’est ni blanc ni noir.

ceux qui évoluent sans cadre: ils cherchent sans trop savoir quoi ni pourquoi”.

Penser différemment, c’est devoir faire l’effort de nombreux pas vers l’Autre, comprendre son mode de fonctionnement et donc s’adapter. Et là, on est sur un fil : attention à garder en tête qui on est et comment on fonctionne au risque de s’épuiser.  En revanche, avoir expérimenté l’adaptation, c’est se donner l’opportunité de pouvoir entre en connexion avec plus de monde et c’est aussi développer des compétences qui nous font sortir de notre zone de confort et donc grandir.

Tout ce chemin est nécessaire pour mieux se connaitre. Est-il possible de faire l’impasse ? Non, nous avons besoin de ressentir les choses, de passer par ces étapes ou l’on se sent rejeté, ou on s’adapte, ou on est en colère…puis descendre en soi, trouver les outils d’une meilleure connaissance de soi nous permettant de nous réaliser. Pour un artiste, une œuvre réussie ne pourra être réalisée qu’à condition de bien connaitre son matériel et la technique. Pour les zèbres, et l’être humain de manière générale, c’est pareil, il est important de connaitre son mode de fonctionnement, ses préférences…pour se réaliser et enfin lâcher prise par rapport à ces appellations (quelles qu’elles soient). Elles ne seront alors plus un sujet.

 

Le diagnostic

Être diagnostiqué ou sentir que les caractéristiques vibrent pour nous, que l’on s’y reconnait, permet de libérer une émotion contenue, de la colère, de la culpabilité… de ne pas avoir été compris ou de ne pas avoir su se protéger ou se comprendre soi -même. Ça peut être la sensation d’avoir perdu du temps à mettre en place des mécanismes d’adaptation.

Comment le diagnostique-t-on?

Le diagnostic est à réaliser par un psychologue qui va proposer un bilan complet, s’intéressant aux différents niveaux d’hyperstimulabilité du haut Potentiel (moteur, le sensoriel, l’imaginaire, l’intellectuel et l’émotionnel) ainsi qu’un test de QI

Il existe quelques self-tests sur le net pour vous donner des indications, une tendance. Pour info, les zèbres identifiés représentent environ 2 % de la population, soit en France un peu plus de 1 million de personnes.

Toutefois, le meilleur indicateur est à mon sens vous-même! Écouter cette petite voix qui vous répète que vous êtes en décalage depuis longtemps, qui vous encourage à vous adapter…

Illustration personnage enseignant le dessin devant un tableau

 

Interview de Pit

Afin d’illustrer tout cela, Pit a eu la gentillesse de nous partager son expérience de zèbre. Merci à lui pour ce partage intime de sa différence et de la façon dont il l’a utilisée pour en faire une réelle force.

Zèbre ou autre, au final, ce qui compte n’est-il pas d’apprendre à utiliser ses crayons, couleurs et techniques pour créer notre propre tableau?

 

  • Peux-tu nous parler de ton expérience de zèbre? Comment l’as-tu vécu enfant ? As-tu trouvé cela handicapant ou à l’inverse comme une force?

Toute mon enfance j’ai eu une cette vague impression d’être différent, mais je ne savais pas en quoi, ni pourquoi. Je me contentais la plupart du temps de suivre l’exemple de mon frère aîné aux tendances Asperger. J’ai eu l’impression pendant un temps de servir d’interface entre lui et le reste du monde. Nous sommes très peu semblables et le premier challenge de ma vie a été de m’adapter à nos différences.

Avec le recul, je me rends compte que cela a dû être bien plus délicat pour lui que pour moi , car il m’a toujours été facile de m’adapter aux différentes situations sociales, tel un caméléon. Pour lui cela a été un apprentissage artificiel et laborieux. Il a beaucoup souffert de sa différence entre lui et les autres. Très cartésien et “brut de décoffrage”, il était le mal-aimé de ses camarades de classe et des adultes en général. Je parle toujours de mon frère pour expliquer ce que je suis devenu, car sa présence a beaucoup influencé mon développement.

Pour ma part, j’ai été éduqué par une mère hypersensible. J’imagine qu’elle a dû beaucoup inspirer mon comportement et mon empathie envers autrui.

J’étais de façon générale très observateur du comportement des personnes évoluant autour de moi, toujours sensible aux petites choses, aux petits détails. J’adorais surprendre, faire plaisir, constater l’émerveillement sur le visage d’autrui.

Globalement, j’ai eu une petite enfance plutôt heureuse contrairement à mon adolescence où il a fallu que je ravale ce côté hypersensible. J’ai beaucoup traîné dans la rue, probablement à la recherche d’une figure autoritaire qui puisse me guider voire m’apprendre à me protéger de la méchanceté des autres. Rentrer dans le moule et me faire le plus discret possible représentaient mon mode de survie du moment.

Pendant ma scolarité, j’ai évolué avec un an d’avance et de ce fait j’étais toujours le plus jeune (et le plus grand en taille) de ma classe. À cette époque, je n’assumais pas du tout ma taille qui était inversement proportionnelle à ma capacité à me défendre psychologiquement et verbalement.

C’est pendant cette période que s’est déclenchée mon envie de créer des bandes dessinées: me perdre dans un monde fictif, un monde qui n’appartienne qu’à moi seul et dans lequel je me sente à l’abri.

Et au final vingt-cinq ans plus tard, c’est toujours dans ce monde créatif que je viens me réfugier quand tout va mal.

Si je devais faire le résumé de mon adolescence, je me décrirais davantage comme le “zèbre” qui souhaitait passer inaperçu dans un troupeau de “chevaux” et qui se sentait aussi fier qu’un “poney”.

 

Illustration d'un Un zèbre parmi les chevaux et qui se prend pour un poney
Un zèbre parmi les chevaux et qui se prend pour un poney

 

  • Quand as-tu été diagnostiqué ? Comment ?

Officiellement ? à 38 ans. C’est ma psychologue qui m’a diagnostiqué mais je me doutais bien du résultat. J’ai commencé à lire sur la surefficience mentale en milieu de trentaine, je crois. Puis de lecture en lecture, j’ai pu apprendre à reconnaître les patterns de mon comportement pour en tirer parti au mieux et m’épanouir en connaissance de causePlus tard, c’est ma psychologue qui en a remis une couche et m’a aidé à prendre du recul sur la partie plus noire et enfouie de ma personnalité.

Je ne regrette pas une seconde de ces dix dernières années de recherche constante d’équilibre.

 

  • Le sentiment de lucidité est caractéristique des zèbres. T’est-il déjà arrivé de te sentir supérieur ? Ou à l’inverse en détresse, emporté en profondeur dans un tourbillon de pensées ?

J’ai longtemps eu un sentiment d’infériorité au contraire. Ce n’est qu’à l’âge adulte que j’ai pris conscience de mes forces et renforcé mes faiblesses, ce qui a pu parfois causer des excès de confiance voire de l’arrogance.

Je me perds souvent dans mes pensées, tel un stratège de la vie, effectivement.

J’avais toujours été un grand rêveur à vrai dire, cet aspect-là n’a pas changé. ;)

 

  • Et maintenant, à l’âge adulte, comment le vis-tu ?

Maintenant que je suis en paix avec moi-même, j’ai l’impression d’avoir plus de facilité à aider mon prochain. Je me sens épanoui et serein la majorité du temps.

Force est de constater que certains traits de personnalités ont révélé leur utilité sur le tard.

Aujourd’hui, je me considère simplement différent dans mon fonctionnement par rapport aux personnes que je connais. Je me nourris de mes échecs. J’en suis friand pour ne pas dire drogué. Cela peut paraître insensé pour un individu normal, mais l’expérience m’a montré que l’échec était indispensable pour trouver sa voie et son bonheur. Il est nécessaire de prendre des risques pour se sentir vivant, pour mieux apprendre de ses erreurs et se relever plus fort que jamais.

Ma vision de l’humain est affreusement simpliste : ceux qui n’échouent jamais ne vivent jamais vraiment.

Cet état d’esprit me donne clairement un avantage dans un monde comme le nôtre. Mais c’est un atout que j’ai forgé avec le temps face à la souffrance de ma condition.

Aujourd’hui, la phase de surcompensation (comme je l’appelle) est derrière moi, donc je considère que le meilleur reste encore à venir.

Je ne cherche plus à en mettre plein la vue, mais seulement à être heureux et à aider les autres à l’être aussi. J’ai attiré dans ma vie des personnes honnêtes et géniales, avec qui il fait bon échanger et vivre le moment présent.

J’ai choisi d’orienter ma vie vers l’altruisme et je m’efforce de montrer l’exemple autant que je le peux.

J’ai retrouvé la joie de vivre de ma petite enfance, mais sans les peurs qui vont avec. Je souhaite cela à tout le monde.

Bien sûr, rien n’est jamais parfait, mais ce qui est sûr c’est que grâce à cette attitude positive la vie ne m’a jamais autant souri. La loi de l’attraction n’est pas une légende.

 

  • Quelle est ou a été la plus grande difficulté associée pour toi à cette situation ?

Ma plus grande difficulté a été d’assumer ma condition après l’avoir identifiée. La recherche constante de développement personnel a pu me soulager de ce que je croyais être un fléau au départ.

 

  • Quelle est la plus grande force que tu en tires ?

J’ai l’impression de savoir vraiment écouter et comprendre les gens qui s’adressent à moi.

J’en ai d’ailleurs fait mon métier en quelque sorte. L’apprentissage du dessin fait partie de mon être et de ce que j’ai à offrir au monde, mais c’est surtout la façon dont je connecte avec les autres qui fait ma force à mon avis. De plus, le fait d’avoir travaillé dans le domaine de la santé a renforcé encore cette capacité à tendre la main et à prêter l’oreille.

 

  • Parmi les différentes formes que cela peut prendre, chez toi, qu’est-ce qui ressort? Il y a autant de façon d’être zèbre que de zèbres. On parle toutefois de différentes formes de manifestations : émotionnelles (hypersensibilité), imaginatives (capacité à visualiser/ inventer / créer), intellectuelle, psychomotrices (surplus d’énergie), sensorielle.. Y en a -t-il certaines plus importantes que d’autres chez toi ?

Pour ma part j’ai l’impression que c’est plutôt assez équilibré à ce niveau.

La sensibilité à fleur de peau était bien sûr présente depuis le début comme je l’ai expliqué précédemment, mais d’autres capacités sont apparues plus progressivement. Par exemple, j’ai acquis au fil du temps une bonne capacité de visualisation (personnalité architecte INTJ-T), ce qui me permet de disséquer facilement un projet ou une action afin de l’optimiser au maximum dans le temps et dans l’espace.

J’ai appris à être un peu plus pragmatique avec l’expérience et un peu moins émotif, ce qui m’a permis de m’extirper de certaines angoisses superflues, notamment celle de toujours vouloir paraître parfait.

J’ai la chance d’avoir pu développer un très bon schéma moteur que je dois en grande partie à ma mère qui nous (mon frère et moi) a toujours poussé à essayer de nombreuses activités sportives étant jeunes. J’ai pu donc profiter de ces capacités motrices pour exceller dans certaines activités telles que les arts martiaux.

 

  • Quels seraient tes conseils à un zèbre (enfant et adulte) pour trouver le bonheur ?

Je n’aime pas vraiment mettre les individus dans des cases donc les conseils qui vont suivre s’appliquent vraiment à tout à chacun. Le premier serait d’être fidèle à ses valeurs : vivre dans l’ombre de quelqu’un d’autre ne rend pas heureux à ma connaissance. Le second serait de se montrer patient avec les autres, car cela aide à accepter sa condition d’humain imparfait. 

Le troisième serait de trouver une philosophie de vie qui nous tire vers le haut, comme par exemple chercher chaque jour à être la meilleure version de soi-même et à entraîner les autres vers le haut dans la foulée. Cela fait un bien fou.

Je pense que la recherche du bonheur ne finit jamais vraiment et la vie est un constant balancement des énergies et des rencontres.

Rien n’est gravé dans la roche et chaque période de la vie demande un certain recul et un ajustement comportemental adéquat.

 

Merci Pit pour ce partage !

 

Conclusions 

Les rayures, la douance, les HP… c’est surtout penser différemment de la façon de penser majoritaire, d’une certaine façon.

Alors s’identifier comme zèbre peut aider à se sentir soulagé, légitimé, reconnu car on y met un nom et surtout on se sent moins seul ! Quand on y pense, je trouve dommage d’avoir besoin d’une catégorie pour cela. A coup sûr, nous découvrirons d’autres catégories, des caméléons, des coccinelles… qui aujourd’hui se sentent marginalisés. Du côté de la société, ce n’est au final qu’une histoire d’acceptation de la différence sous toute ses formes, sans attendre des études et une démonstration neuroscientifique.  De l’autre côté, celui du zèbre (ou du “différent” de manière générale), c’est une histoire d’acceptation de soi juste tel que l’on est, en étant à notre écoute, sans recherche de validation externe.

Quelque soit la catégorie dans laquelle on se retrouve ou bien dans laquelle on veut nous mettre, le principal est d’identifier ses propres forces, de s’écouter, TOUJOURS!!!, sans chercher à l’extérieur ce que l’on sait à l’intérieur, l’objectif étant de se réaliser et ça, personne ne pourra le faire à notre place.