Economiser ses traits pour mieux dessiner?

Dessinez mieux et économisez votre mine? ça peut sonner bizarre et pourtant…Lisez plutôt la suite… :)

Il est toujours intéressant de se voir évoluer au fil des années. Le fait de conserver ses dessins et de les regarder de temps en temps s’avère donc toujours être une bonne idée.Cela dit, il est parfois difficile de différencier ce qui est bon à jeter de ce qu’il faut conserver.

La plupart du temps je conseille aux internautes de ne conserver que les dessins pour lesquels:

  • ils ont passé plus d’une heure.
  • ils sont satisfaits d’au moins un aspect du dessin.
  • ils ont l’impression d’ avoir franchi un niveau dans leur progression.

 

Malheureusement avec le temps on a tendance à trouver ses vieux dessins de plus en plus médiocres, et c’est tout à fait normal. On ne doit pas pour autant se sentir mal par rapport à ça. Nos vieux dessins sont une trace historique de ce que l’on a été à un moment donné, et il est important de les conserver pour réaliser le chemin parcouru. Nous comparer avec d’autres artistes est aussi utile parfois, mais jamais autant que de nous comparer avec notre “ancien nous”.

 

Portraits femmes
Il y a quelques années il m’était très difficile de dessiner des visages… aujourd’hui le dessin de visage est devenu un de mes points forts. La rigueur paie toujours.

 

Un point intéressant dans le fait de revoir et de réanalyser nos vieilles créations, est que nous pouvons nous rendre compte des erreurs récurrentes que nous avons tendance à faire encore aujourd’hui et cette prise de conscience nous offre toujours de nouvelles pistes pour progresser.

Un des éléments qui m’a le plus marqué en observant certains de mes vieux dessins, est le nombre de détails inutiles au centimètre carré. En effet c’est une tendance que l’on a tous de vouloir trop en faire. Et devinez quoi! copier une référence bêtement va encore aggraver les choses (ce n’est plus une surprise pour les habitués du blog ^^).

 

Le concept d’économie

J’ai entendu pour la première fois parler du concept d’économie en 2010, à une époque où je dévorais tous les livres d’art que je trouvais. Le document anglophone sur lequel je suis tombé et qui en parle le mieux à mon sens, a été publié en 1956: The Concept of Economy in Art, article paru dans “The Journal of Aesthetics and Art Criticism” et écrit par Monroe C. Beardsley.

Pour vous  éviter des recherches longues et laborieuses, je vais essayer de vous résumer ce concept au mieux, et surtout, les aspects qui m’intéressent le plus, pour que vous puissiez les mettre en application sur vos dessins sans attendre.

“Less is more” résume bien ce concept. Littéralement traduit “moins c’est plus”. En gros, moins on en fait sur notre feuille, et mieux c’est.

En effet, si je vous dis que j’ai passé 3 heures à peindre cette image, comment allez-vous la critiquer?

 

trait-rouge
Non, je ne signerai pas ce dessin, même sous la torture :)

 

Certains critiques d’art pourraient passer des heures à débattre et à analyser, mais pour nous autres simples mortels, il s’agit simplement d’un coup de pinceau rouge sur un fond blanc. Il n’y a pas grand chose à dire dessus. On se demande simplement comment l’artiste a pu passer 3 heures sur une toile aussi pauvre en peinture. Certains pourraient même penser à (veuillez me pardonner l’expression) du “foutage de gueule en bonne et due forme”.

Bon, certains lecteurs risquent de grincer des dents dans l’assemblée, mais lorsque pour comprendre une peinture il me faut un manuel d’explications, on m’a déjà perdu, désolé. (Vous l’aurez compris, je ne suis pas tellement “art moderne”, à part lorsque l’artiste a fait en sorte que son œuvre ait un minimum de sens pour le commun des mortels… enfin chacun ses goûts hein.)Le concept d’économie est donc directement lié à ce que l’on montre, que l’on soit dessinateur ou peintre, et plus particulièrement à ce que l’on ne montre pas. En effet, lorsqu’on débute, on a tendance à toujours trop en faire, car on considère spontanément qu’en art, c’est comme au travail: plus on en fait, mieux c’est.

Sauf que ce qui interpelle généralement le grand public ce n’est pas tant les heures que l’artiste y a passées, ni même la technique, mais plutôt l’émotion qui se dégage de l’œuvre et les sentiments que cela provoque en lui. Si une œuvre ne réussit pas à faire ressentir quelque-chose au spectateur, si elle ne le transporte pas, ne le rend pas curieux, ou ne lui communique aucun message, elle ne représentera rien à ses yeux et il passera rapidement à autre chose en l’oubliant complètement.

 

Le pouvoir de la suggestion

Suggérer, ou comment moins détailler pour mieux se démarquer: tout un art me direz-vous! Il faut déjà être capable de se rendre compte qu’on en a trop fait, et pour ça, rien de tel que de prendre son temps et de réfléchir avant chaque action.

En effet, rappelez vous d’un des premiers dessins que vous avez hachuré… y avait-il besoin d’autant de hachures? quelle est la limite à ne pas dépasser? difficile à dire quand on n’a pas l’œil. Mais le simple fait de nous poser cette question peut nous éclairer:  “si j’ajoute des traits ou des coups de pinceau, vais-je apporter de la valeur à mon dessin ou pas, par rapport à l’objectif que je me suis fixé?”

 

peinture visage
Sur ce genre de portrait rapide et graphique, j’essaie de faire en sorte de limiter les coups de pinceaux, pour aller rapidement dans le vif du sujet sans trop en faire.

 

Bien sûr, un peu d’expérience est nécessaire pour déterminer le stade auquel on devrait s’arrêter. Cela dit, il n’est jamais trop tôt pour se poser la question, même pour un dessin débutant.

Le pouvoir de la suggestion ne doit être ignoré dans aucun art. On perd parfois des heures voire des jours de travail si l’on ne prend pas les bonnes décisions lors de la planification d’un projet. Et quand on part dans une direction, on persiste souvent dans cette même direction, sans se poser les bonnes questions sur la finalité de l’oeuvre.Assumez donc votre rôle de “directeur artistique”: le fait de savoir où vous allez n’est pas un luxe, mais une nécessité pour finaliser un projet dans de bonnes conditions.Pourquoi pensez-vous que de nombreuses personnes procrastinent et finissent rarement leur projet… parce qu’elles ne se sont fixées aucun objectif précis!

Le meilleur exemple que je peux évoquer au sujet du gain de temps (et d’argent) que permet un bon équilibre entre le visible et le suggéré, est le storyboard au cinéma. Imaginez un plan à effets spéciaux d’un personnage se faisant dévorer par un alien…

 

Un chat dans l'ombre
Un chat effrayé et tapis dans l’ombre vaut mieux qu’un long discours…

 

Concrètement, la société de production devra débourser des centaines de milliers de dollars pour un plan, et passer par des studios tiers pour la sous-traitance de la production de ces images de synthèse, sans parler du temps perdu!

Gardez aussi en tête que le fait de stimuler l’imagination du spectateur vaut tous les visuels du monde. Vous ne pourrez jamais rivaliser avec l’imaginaire d’un individu par l’intermédiaire d’une simple image, aussi réaliste ou belle soit-elle.

L’imaginaire de chacun restera toujours le facteur le plus important, et le fait de suggérer vous permettra de toucher plus de monde (car qui dit imaginaire, dit pensée propre à chaque individu).

 

film psychose
Hitchcock l’avait prouvé à maintes reprises. La suggestion est souvent la solution la plus efficace pour tenir le spectateur en haleine.

 

Comptez vos gestes

Non non, je ne plaisante pas… quand vous dessinez ou peignez, comptez vos gestes, au moins pour vous aider au départ à les économiser.

Si vous souhaitez dessiner un visage en 20 gestes plutôt qu’en 50, c’est possible.

Pour cela il faut d’abord prendre son temps et réfléchir à une stratégie: le chemin le plus court.

Et pour être efficace, il faut trouver avant tout comment organiser ses traits de contour ou sa hiérarchie de valeur (= organiser ses tonalités).

De plus, le pouvoir couvrant d’un médium a toute son importance.

Avec la tranche d’un fusain, on couvre plus vite la surface du papier qu’avec un criterium, cela va sans dire. Cette technique requiert donc moins de mouvements.

Il en va de même pour les pinceaux: un pinceau de plus grande taille nous permettra d’aller plus vite à l’essentiel qu’un pinceau de petite taille, et de dégrossir facilement.

 

portrait fusain
Il m’aura fallu un peu moins d’une heure pour réaliser ce portrait. Sans utiliser la tranche du fusain cela m’aurait été impossible d’aller aussi vite.

 

Souvenez-vous des premiers croquis qui ont conquis votre cœur pour la première fois. Un des premiers croquis que j’avais adoré et qui semblait spontané était ce crayonné de Régis Loisel.

 

Illustration La fée clochette

 

Il m’avait instantanément transporté: ce n’est pas tant le réalisme qui m’a conquis, mais la facilité avec laquelle mon œil navigue au travers de traits expressifs, affirmés et bien placés ainsi que la place laissée à l’imaginaire et à la suggestion: l’univers contextuel qui gravite autour du personnage est senti, mais n’est pas représenté entièrement, pour laisser de l’espace à l’esprit du spectateur. Qu’on le veuille ou non, c’est souvent cet espace que l’on laisse visuellement qui va déterminer si les gens vont aimer ou non.

Évidemment, les goûts et les couleurs ne se discutent pas. Vous trouverez des personnes manquant d’imagination et préférant que l’on en dise plus sur un dessin. Cela dit, il y a fort à parier que vous convaincrez davantage de personnes en laissant de la place à leur esprit créatif et en vous imposant de ne pas trop en divulguer visuellement.

 

Quand s’arrêter?

La question légitime que certains pourraient se poser est: “oui mais quand s’arrêter? Quand puis-je savoir lorsqu’un dessin est fini ou pas?” La réponse est simple en réalité: le dessin est terminé lorsque l’objectif principal que l’on s’est fixé a été atteint. Le reste n’est que du bonus, et ce “bonus” peut s’avérer catastrophique s’il rentre en conflit avec l’intention initiale.

Si l’illustration que l’on a achevée correspond à ce que l’on attendait et remplit l’objectif initial, alors le but est atteint, on peut passer à autre chose. La question à réellement se poser est: “si j’ajoute encore du travail, la création aura-t-elle davantage de valeur dans le contexte de ce projet?”. S’il s’agit d’une amélioration graphique ou de détails qui n’affectent pas l’objectif principal, alors pas de problème. Dans le cas contraire c’est ennuyeux.

Imaginez un instant que vous venez de représenter un détail sans importance mais qui prend trop de notre attention (ex: trop de contraste dans un coin du dessin sans importance), croyez-vous qu’un individu normal ne critiquera pas ce détail bancal qui vient gêner la lecture? Ce que je sais bien du grand public, c’est que lorsque c’est bien fait, ça passe et c’est normal, mais lorsqu’il y a quelque chose qui ne fonctionne pas, il vous en fait la remarque rapidement! :)

 

dessin vignettes
Le dessin de vignette est le b.a-ba de toute image créative.

 

Bien sûr, pour remplir un objectif, il faut d’abord se le fixer. C’est pour cela que j’insiste sur le concept d’intention. Si vous n’avez aucune intention, aucun objectif, et que vous ne planifiez ou ne visualisez pas votre travail final avec un minimum d’avance, il est assez risqué de continuer. C’est donc pour cette raison qu’il est préférable de décomposer le développement de votre image en étapes, pour arriver à un résultat convenable sans prendre le risque d’être obligé de tout recommencer.

Ceci dit, cela ne vous empêche pas de dessiner un peu au hasard de temps à autre, histoire de vous défouler et de chercher une créativité spontanée… mais l’expérience m’a prouvé que les personnes ayant bien défini leur projet restent les plus productives et apprennent bien plus vite que les autres. C’est un fait! c’est réel! De plus, un projet bien défini produit de la motivation, de l’émulation et nous pousse à planifier et à faire des recherches au moment opportun plutôt que d’apprendre des choses dans le vide, pour devoir les réapprendre 2 ans plus tard.

Rappelez-vous toujours que sans objectif, le dessinateur n’est qu’une âme en peine, un électron libre qui finira, comme bon nombre d’apprentis, par abandonner avant même d’avoir commencé.

 

Exemple de technique pour économiser du travail et rester efficace

A l’occasion de ma dernière formation, j’ai pu montrer les étapes d’une scène inventée à partir d’une histoire que je me suis racontée au préalable. Le thème était: “dame nature rend visite à la famille renard”.

 

vignette dessin
L’étape 2 de la vignette était aussi grande que la paume de ma main.

 

Le projet était bien défini. L’histoire était réelle dans ma tête, je visualisais plutôt bien l’essentiel de la scène, même si certains aspects me semblaient encore flous. Après avoir posé des mots sur la scène, j’ai enchaîné sur le dessin de vignettes puis j’ai choisi celle qui me convenait le mieux dans la lecture graphique et la composition. J’ai ensuite développé une deuxième maquette un peu plus précise, puis j’ai pu passer à la recherche/prise de références pour m’aider à développer le décor et apporter un peu de réalisme aux protagonistes.

Vous noterez que dans les différentes étapes, je commence par une impression de valeurs, en intégrant 4 valeurs en plus de la valeur du papier semi-teinte.

J’ai d’abord posé les hautes lumières, là où la lumière du soleil tape directement. Ensuite j’ai indiqué les points focaux principaux, là où je désirais que l’attention du public se porte.

J’ai mis en évidence ces points rapidement en utilisant les valeurs les plus intenses que peuvent me procurer mes crayons (pierre noire dans ce cas), ce qui me permet d’arrêter mon travail de détail quand je le souhaite car l’essentiel a déjà été dessiné.

 

Illustration finale Formation dessin d'inspiration
Alors? trop de détails? pas assez de détails? En tout cas l’essentiel est décrit. La composition semble équilibrée et l’histoire est racontée correctement. J’ai peu contrasté les éléments du bord de l’image, pour ne pas que l’œil s’échappe sur les côtés.

 

Imaginons que cette image ait été destinée à un éditeur, il m’aurait été facile de respecter les délais même si le travail de finition n’était pas réellement terminé. Au moins l’essentiel est raconté, le reste (ex: la finition du décor) n’est que du bonus.

Vous remarquerez que mon décor, qui est plus ou moins détaillé, ne remet pas en question mon illustration en détournant l’attention inutilement. C’est d’ailleurs pour cette raison que ces zones sont davantage décontrastées, et si on prend le temps d’explorer un peu l’image, on se rend compte du travail sur les détails sans que cela dérange la lecture.

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51 réponses

  1. Merci pour ces conseils avisés que vous dispensez généreusement sur ce blog. J’enseigne moi-même le dessin depuis plusieurs années et j’y trouve de bonnes idées à transmettre à mes élèves.

    Cordialement

  2. Vraiment super cet article, ça me fait penser que Miles Davis a dii : Pourquoi jouer tant de notes alors qu’il suffit de jouer les meilleures ?, c’est exactement pareil en musique. Ou encore il a dit: “La véritable musique est le silence et toutes les notes ne font qu’encadrer ce silence.” on pourrait comparer le silence à la lumière…Merci Pit.

  3. Super sympa comme article !
    Un style de dessin de suggestion que j’adore c’est le dessin sur papier noir !
    J’en fais depuis quelques mois et c’est assez rapide à prendre en main : en quelques dixaines de minutes, on peut avoir un dessin impressionnant et bien finit !
    En plus, pour l’apprentissage des zones de lumières c’est le top je trouve !!

  4. Question économie de trait, suggestion et minimalisme on peut se référer à Hugo Pratt qui en trois lignes verticales et deux horizontales réalisait tout un paysage et des personnages. Et aussi Mike Mignola, peu de traits peu de couleurs, mais de l’expressivité à revendre.

  5. Je me sens tellement concernée! Je dessine souvent sans réfléchir et à la fin je ne suis pas satisfaite du résultat, je trouve toujours que mon dessin ne retranscrit pas ma pensée. Je vais travailler sérieusement tout ça. Merci pour ces précieux conseils Pit! Depuis que je lis tes articles j’ai fait des progrès et ça booste la motivation!

  6. Salut,je reçois souvent de tes messages que j’aime bien.je voudrai progresser en dessin mais avant je vais t’envoyer mes dessins de débutant pour que tu me fasses une appreciation si je peux continuer dans le dessin et les progrès à réaliser merci à bientôt

  7. toujours un super article !
    justement j’ai l’impression que dans mon cas ( même si c’est vrai que ça ne l’était pas avant, seulement depuis cette année où je dessine beaucoup plus ) je dessine vite mais avec très peu de détails, et les valeurs, eh bien par exemple dans le métro je les oublie^^
    je me dis de chercher à d’abord savoir dessiner le détail pour ensuite le suggérer avec plus de facilité, mais du coup est ce une bonne chose, ou je peux me laisser faire du ” vite fait” régulièrement ?

    1. quand tu dessines du croquis vivants, du vite fait te permet de saisir graphiquement ce que tu ne pourrais pas vraiment en plusieurs heures.
      Donc le mieux comme d’habitude, est d’équilibrer tes pratiques, d’un côté des croquis sur le vif, de l’autre des dessins plus fignolés.

  8. Bonjour Pit
    Je suis en plein travail d’apprentissage sur ton cours débutant. Mon défaut de toujours le détail !
    et je m’y perd. Je passe des heures sur un dessin. Même si le résultat me parait malgré tout pas si mal(un peu d’autosatisfaction ne fait pas de mal)je comprend avec cet article que c’est un gros point de progrès que j’ai là.
    Je m’applique à suivre le déroulement de ton cours débutant, il est très pédagogique.
    A bientôt
    Marc

    1. Merci pour ton retour Marc.
      Effectivement, l’économie est un point noir, même pour les professionnels je te rassure.
      Avec le temps et le recul, on peut parvenir à aller plus vite à l’essentiel, et y parvenir plus efficacement.
      Il faut faire confiance au temps et à la réflexion.
      Il est toujours bon de se poser des questions au dessus du papier, et ne pas se faire engloutir totalement dans le principe instinctif: “j’aurais mieux si je fais +”

  9. Très intéressant !
    Un précieux conseil à appliquer dans tellement de domaines !
    Je suis ravie du contenu ludique, clair et précis de la formation…qui va bien au delà du dessin
    Merci Pit, heureuse de faire partie du “groupe”
    Sandra M

  10. Je me retrouve dans plein d’idées soulevées dans l’article : le fait de voir tous les défauts de ces anciens dessins, la difficulté à savoir où s’arrêter. Merci pour ce bel approfondissement des idées.

  11. A quel moment s’arrêter pour éviter de trop en faire, mais aussi, comment détecter qu’il manque encore quelque chose de plus à notre dessin?

    Quand je fais mes crayonnés, j’y vais souvent au feeling. Il y a le dessin “plaisir”, comme le besoin de faire quelque chose. Et le dessin “projet”.

    Plus je te lis Pit, plus je prends conscience du long chemin qu’il me reste à parcourir.

    Quand je crayonne, je mets trop de coups de crayons, d’ailleurs parfois je demande à mon mari “tu en penses quoi?”, mais il a du mal à bien visualiser le dessin si je ne l’ai pas “nettoyé” au préalable. Je dessine par acoups / hachures, donc à cette étape j’en fais trop.
    Et pour autant, une fois le dessin mit au propre, colorisé, je le trouve plat. Il peut être techniquement réussit au niveau proportions et tout, mais il est lisse, sans “âme”.

    Je prends conscience que, même par plaisir, il faut essayer d’être juste dans nos dessins. Faire la vignette devrait être systhématique. Réfléchir à l’histoire qu’on veut raconter aussi. Je dois prendre de nouvelles habitudes quand je dessine.

    “Pourquoi pensez-vous que de nombreuses personnes procrastinent et finissent rarement leur projet… parce qu’elles ne se sont fixées aucun objectif précis!”

    Tu parles de moi là Pit XD
    j’ai plein de projets et j’en ai finis peu… pourtant je ne lâche pas l’affaire, j’en ai encore en tête, je peux les traîner des années durant, mais je ne me donne pas suffisemment le temps d’avancer.

    j’ai du boulot qui m’attend ^^’

    1. Je parle d’un bon nombre d’entre nous en réalité! :)
      Si tu t’es reconnue dans mes propos, je pense que c’est le cas de pas mal de lecteurs aussi.
      Il faut “simplement” y croire et ne jamais abandonner, dans tout ce qu’on fait dans la vie.

  12. Très bon article, comme d’habitude d’ailleurs !
    Je n’avais jamais vraiment considéré le nombre de traits ou de coup de brush comme important, mais depuis que j’ai appris cette méthode de vignettes dans une de tes formations pour décomposer le projet avant de commencer, je suis vraiment une autre dessinatrice et j’ai remarqué que mon travail avait beaucoup moins de traits qu’avant ! Au final préparer à l’avance permet d’éviter de perdre un temps précieux et de trop en faire, ou de se décourager avant la fin. Ca m’a complètement changé la vie et maintenant je sais où je vais avant même d’avoir attaqué et c’est super sécurisant. Je progresse à la vitesse de la lumière, alors merci pour tes précieux conseils!

  13. J’aime beaucoup le principe des vignettes qui permettent d’expérimenter à moindre frais.
    Surtout quand on a une idée dans la tête et pas le temps (boulot, sorties etc.) pour vraiment y réfléchir.
    Personnellement je trouve que ça encore mieux lorsque je laisse mes pensées dériver (en début d’aprèm par exemple ^^)

    Sinon je trouve que ce blog est très formateur, beau boulot!

  14. Très intéressant, et me montre tout le chemin que j’ai encore à parcourir! Mais je tiens mon pari, je dessine une heure tous les jours depuis maintenant un bon mois. Je ne sais pas si ça rejoint ton propos, mais le fait de me limiter à une heure fait que je dessine, sinon si je m’embarque sans me mettre de limites, je suis partie pour deux ou trois heures facile et comme je le sais, je ne le fais pas, vu qu’il y a tout le reste à faire. Bien sûr, je laisse la porte ouverte à des plages plus longues, au moins en théorie (ça ne m’est pas encore arrivé, je ne veux pas risquer de casser cet humble projet de revenir tous les jours sur le papier) et aussi, ça m’aide à tenter de finir un dessin sur un temps donné, donc à dessiner l’essentiel d’abord. Prochaine étape: photographier quelques uns de mes travaux pour les partager avec la communauté… ça viendre… (mon second prénom, c’est Tortue, mais il paraît que symboliquement, c’est un très bel animal ^^)

    1. En effet se fixer une limite de temps aide beaucoup pour progresser. Je surveille souvent l’heure quand je dessine, ce qui me permet de toujours rester “connecté” à ce que je fais, et rester un minimum spontané, car plus on fait durer et plus on s’endort sur son projet.
      j’ai hâte de voir ton travail Chantal! à bientôt :) :)

  15. Admiratif de cette facilité de visualiser l’imaginaire et surtout de le reproduire !!!!
    Des conseils et trucs&astuces auxquels on ne pensent pas systématiquement….
    B R A V O !!!! Pit !

    Jeff

    1. Merci Jeff!
      ce n’est pas vraiment facile et cela ne l’a jamais été en réalité!
      j’ai juste un peu d’expérience et une sacrée motivation. Ça me sauve!

  16. Oô grand Maître ! Bonjour ! J’ai reconnu “La Quête de l’Oiseau du Temps” qui faisait partie de mes meilleures ventes BD. Souvenirs souvenirs … Maître je ne copiais plus depuis 20 ans et des bananes mais j’ai cédé à la tentation narcissique de vérifier si j’étais encore capable de faire un dessin figuratif vu que ces derniers temps c’est du grand n’importe quoi ce que je fais. En 1h30 + ou – j’ai copié Walt Disney et Mickey justement en économisant mes coups de crayon HB parce que sinon ça devient vite un torchon. Donc je vous rejoins complètement dans cet article. Pour les autres points je ne suis pas compétente. Maintenant à la fin j’ai vite constaté que le nez était trop long mais bon comme vous dites mon Walt il me plaisait bien quand même. À la limite c’est Mickey qui ne me convenait pas. Merci de votre patience … et tout votre travail titanesque ;-) Bonjour à Océ

      1. Zut j’ai cru que j’avais raté mon envoi ! Grand Maître vous allez recevoir un autre commentaire ! Désolée Pour le dérangement et à bientôt :(

        1. Ne t’inquiète pas, les commentaires sont validés manuellement.
          Cela prend un peu de temps, et j’aime prendre mon temps pour répondre à tout le monde. :)

      2. lol si l’on parle des premiers coup de cœur certes Hergé est incontournable mais mes premier émois vont a Franquin qui n’est pas si ligne clair que ca surtout si on voit les originaux des idées noires

  17. Merci pour cet article très intéressant. En effet, je me noie souvent dans les détails sans savoir quand m’arrêter. Ces informations vont m’aider à mieux gérer mon travail. Merci Pit ?

  18. Ce qui est sûr c’est que tu n’as pas économisé tes mots pour nous expliquer tout ça.
    Si après cet article on continue à se perdre dans les détails c’est qu’il faut décidément passer à autre chose :)
    Merci Pit

    1. héhé en effet :)
      remarque j’aurais encore pu davantage développer et donner plus d’exemple.
      j’ai l’habitude de pondre des pavés encore plus gros que cela, huhu :) :)

    1. on croit toujours mieux faire en faisant plus, mais je crois que ces conseils s’appliquent dans quasi tous les domaines.
      merci à toi

  19. Oui!!! La plupart du temps je gâche mes croquis à cause de ça, je ne prévois pas assez ce que je veux privilégier dans ma page et commme je vois bien que le but n’est pas atteint je finis par tout remplir….pas de blanc ,pas de hiérarchie et beaucoup beaucoup trop de détails ! Merci pour ce tuto
    Fcse

  20. “En effet, rappelez vous d’un des premiers dessins que vous avez hachuré… y avait-il besoin d’autant de hachures?”
    Je me suis un peu senti visé là dedans. J’y vais souvent au feeling, mais parfois je veux trop en faire.
    En revanche je me vois mal compter mes coups de crayon, sans compter les coups de gomme encore trop fréquent…
    Très intéressant les étapes de ton illustration.

  21. À nouveau un article intéressant! Le concept d’économie est aussi utilisé dans la communication écrite. Un bon rédacteur fait l’économie des mots comme le bon dessinateur fait l’économie des détails. Dans les 2 cas, c’est difficile, car on doit réfléchir à chacun des mots ou à chaque trait de crayon ou étape.

    1. J’apprécie chaque fois vos communiqués ..
      Tout y est enrichissant , et vos traits d’humour sentis .
      Votre site est sympathique. Votre pédagogie est fine, chaleureuse , efficace et fraternelle, sans emphase ..alors oui, j’aime et je me régale .

      Merci pour votre participation à enchanter le monde , MI

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Economiser ses traits pour mieux dessiner?

Economiser ses traits pour mieux dessiner?

Dessinez mieux et économisez votre mine? ça peut sonner bizarre et pourtant…Lisez plutôt la suite… :)

Il est toujours intéressant de se voir évoluer au fil des années. Le fait de conserver ses dessins et de les regarder de temps en temps s’avère donc toujours être une bonne idée.Cela dit, il est parfois difficile de différencier ce qui est bon à jeter de ce qu’il faut conserver.

La plupart du temps je conseille aux internautes de ne conserver que les dessins pour lesquels:

  • ils ont passé plus d’une heure.
  • ils sont satisfaits d’au moins un aspect du dessin.
  • ils ont l’impression d’ avoir franchi un niveau dans leur progression.

 

Malheureusement avec le temps on a tendance à trouver ses vieux dessins de plus en plus médiocres, et c’est tout à fait normal. On ne doit pas pour autant se sentir mal par rapport à ça. Nos vieux dessins sont une trace historique de ce que l’on a été à un moment donné, et il est important de les conserver pour réaliser le chemin parcouru. Nous comparer avec d’autres artistes est aussi utile parfois, mais jamais autant que de nous comparer avec notre “ancien nous”.

 

Portraits femmes
Il y a quelques années il m’était très difficile de dessiner des visages… aujourd’hui le dessin de visage est devenu un de mes points forts. La rigueur paie toujours.

 

Un point intéressant dans le fait de revoir et de réanalyser nos vieilles créations, est que nous pouvons nous rendre compte des erreurs récurrentes que nous avons tendance à faire encore aujourd’hui et cette prise de conscience nous offre toujours de nouvelles pistes pour progresser.

Un des éléments qui m’a le plus marqué en observant certains de mes vieux dessins, est le nombre de détails inutiles au centimètre carré. En effet c’est une tendance que l’on a tous de vouloir trop en faire. Et devinez quoi! copier une référence bêtement va encore aggraver les choses (ce n’est plus une surprise pour les habitués du blog ^^).

 

Le concept d’économie

J’ai entendu pour la première fois parler du concept d’économie en 2010, à une époque où je dévorais tous les livres d’art que je trouvais. Le document anglophone sur lequel je suis tombé et qui en parle le mieux à mon sens, a été publié en 1956: The Concept of Economy in Art, article paru dans “The Journal of Aesthetics and Art Criticism” et écrit par Monroe C. Beardsley.

Pour vous  éviter des recherches longues et laborieuses, je vais essayer de vous résumer ce concept au mieux, et surtout, les aspects qui m’intéressent le plus, pour que vous puissiez les mettre en application sur vos dessins sans attendre.

“Less is more” résume bien ce concept. Littéralement traduit “moins c’est plus”. En gros, moins on en fait sur notre feuille, et mieux c’est.

En effet, si je vous dis que j’ai passé 3 heures à peindre cette image, comment allez-vous la critiquer?

 

trait-rouge
Non, je ne signerai pas ce dessin, même sous la torture :)

 

Certains critiques d’art pourraient passer des heures à débattre et à analyser, mais pour nous autres simples mortels, il s’agit simplement d’un coup de pinceau rouge sur un fond blanc. Il n’y a pas grand chose à dire dessus. On se demande simplement comment l’artiste a pu passer 3 heures sur une toile aussi pauvre en peinture. Certains pourraient même penser à (veuillez me pardonner l’expression) du “foutage de gueule en bonne et due forme”.

Bon, certains lecteurs risquent de grincer des dents dans l’assemblée, mais lorsque pour comprendre une peinture il me faut un manuel d’explications, on m’a déjà perdu, désolé. (Vous l’aurez compris, je ne suis pas tellement “art moderne”, à part lorsque l’artiste a fait en sorte que son œuvre ait un minimum de sens pour le commun des mortels… enfin chacun ses goûts hein.)Le concept d’économie est donc directement lié à ce que l’on montre, que l’on soit dessinateur ou peintre, et plus particulièrement à ce que l’on ne montre pas. En effet, lorsqu’on débute, on a tendance à toujours trop en faire, car on considère spontanément qu’en art, c’est comme au travail: plus on en fait, mieux c’est.

Sauf que ce qui interpelle généralement le grand public ce n’est pas tant les heures que l’artiste y a passées, ni même la technique, mais plutôt l’émotion qui se dégage de l’œuvre et les sentiments que cela provoque en lui. Si une œuvre ne réussit pas à faire ressentir quelque-chose au spectateur, si elle ne le transporte pas, ne le rend pas curieux, ou ne lui communique aucun message, elle ne représentera rien à ses yeux et il passera rapidement à autre chose en l’oubliant complètement.

 

Le pouvoir de la suggestion

Suggérer, ou comment moins détailler pour mieux se démarquer: tout un art me direz-vous! Il faut déjà être capable de se rendre compte qu’on en a trop fait, et pour ça, rien de tel que de prendre son temps et de réfléchir avant chaque action.

En effet, rappelez vous d’un des premiers dessins que vous avez hachuré… y avait-il besoin d’autant de hachures? quelle est la limite à ne pas dépasser? difficile à dire quand on n’a pas l’œil. Mais le simple fait de nous poser cette question peut nous éclairer:  “si j’ajoute des traits ou des coups de pinceau, vais-je apporter de la valeur à mon dessin ou pas, par rapport à l’objectif que je me suis fixé?”

 

peinture visage
Sur ce genre de portrait rapide et graphique, j’essaie de faire en sorte de limiter les coups de pinceaux, pour aller rapidement dans le vif du sujet sans trop en faire.

 

Bien sûr, un peu d’expérience est nécessaire pour déterminer le stade auquel on devrait s’arrêter. Cela dit, il n’est jamais trop tôt pour se poser la question, même pour un dessin débutant.

Le pouvoir de la suggestion ne doit être ignoré dans aucun art. On perd parfois des heures voire des jours de travail si l’on ne prend pas les bonnes décisions lors de la planification d’un projet. Et quand on part dans une direction, on persiste souvent dans cette même direction, sans se poser les bonnes questions sur la finalité de l’oeuvre.Assumez donc votre rôle de “directeur artistique”: le fait de savoir où vous allez n’est pas un luxe, mais une nécessité pour finaliser un projet dans de bonnes conditions.Pourquoi pensez-vous que de nombreuses personnes procrastinent et finissent rarement leur projet… parce qu’elles ne se sont fixées aucun objectif précis!

Le meilleur exemple que je peux évoquer au sujet du gain de temps (et d’argent) que permet un bon équilibre entre le visible et le suggéré, est le storyboard au cinéma. Imaginez un plan à effets spéciaux d’un personnage se faisant dévorer par un alien…

 

Un chat dans l'ombre
Un chat effrayé et tapis dans l’ombre vaut mieux qu’un long discours…

 

Concrètement, la société de production devra débourser des centaines de milliers de dollars pour un plan, et passer par des studios tiers pour la sous-traitance de la production de ces images de synthèse, sans parler du temps perdu!

Gardez aussi en tête que le fait de stimuler l’imagination du spectateur vaut tous les visuels du monde. Vous ne pourrez jamais rivaliser avec l’imaginaire d’un individu par l’intermédiaire d’une simple image, aussi réaliste ou belle soit-elle.

L’imaginaire de chacun restera toujours le facteur le plus important, et le fait de suggérer vous permettra de toucher plus de monde (car qui dit imaginaire, dit pensée propre à chaque individu).

 

film psychose
Hitchcock l’avait prouvé à maintes reprises. La suggestion est souvent la solution la plus efficace pour tenir le spectateur en haleine.

 

Comptez vos gestes

Non non, je ne plaisante pas… quand vous dessinez ou peignez, comptez vos gestes, au moins pour vous aider au départ à les économiser.

Si vous souhaitez dessiner un visage en 20 gestes plutôt qu’en 50, c’est possible.

Pour cela il faut d’abord prendre son temps et réfléchir à une stratégie: le chemin le plus court.

Et pour être efficace, il faut trouver avant tout comment organiser ses traits de contour ou sa hiérarchie de valeur (= organiser ses tonalités).

De plus, le pouvoir couvrant d’un médium a toute son importance.

Avec la tranche d’un fusain, on couvre plus vite la surface du papier qu’avec un criterium, cela va sans dire. Cette technique requiert donc moins de mouvements.

Il en va de même pour les pinceaux: un pinceau de plus grande taille nous permettra d’aller plus vite à l’essentiel qu’un pinceau de petite taille, et de dégrossir facilement.

 

portrait fusain
Il m’aura fallu un peu moins d’une heure pour réaliser ce portrait. Sans utiliser la tranche du fusain cela m’aurait été impossible d’aller aussi vite.

 

Souvenez-vous des premiers croquis qui ont conquis votre cœur pour la première fois. Un des premiers croquis que j’avais adoré et qui semblait spontané était ce crayonné de Régis Loisel.

 

Illustration La fée clochette

 

Il m’avait instantanément transporté: ce n’est pas tant le réalisme qui m’a conquis, mais la facilité avec laquelle mon œil navigue au travers de traits expressifs, affirmés et bien placés ainsi que la place laissée à l’imaginaire et à la suggestion: l’univers contextuel qui gravite autour du personnage est senti, mais n’est pas représenté entièrement, pour laisser de l’espace à l’esprit du spectateur. Qu’on le veuille ou non, c’est souvent cet espace que l’on laisse visuellement qui va déterminer si les gens vont aimer ou non.

Évidemment, les goûts et les couleurs ne se discutent pas. Vous trouverez des personnes manquant d’imagination et préférant que l’on en dise plus sur un dessin. Cela dit, il y a fort à parier que vous convaincrez davantage de personnes en laissant de la place à leur esprit créatif et en vous imposant de ne pas trop en divulguer visuellement.

 

Quand s’arrêter?

La question légitime que certains pourraient se poser est: “oui mais quand s’arrêter? Quand puis-je savoir lorsqu’un dessin est fini ou pas?” La réponse est simple en réalité: le dessin est terminé lorsque l’objectif principal que l’on s’est fixé a été atteint. Le reste n’est que du bonus, et ce “bonus” peut s’avérer catastrophique s’il rentre en conflit avec l’intention initiale.

Si l’illustration que l’on a achevée correspond à ce que l’on attendait et remplit l’objectif initial, alors le but est atteint, on peut passer à autre chose. La question à réellement se poser est: “si j’ajoute encore du travail, la création aura-t-elle davantage de valeur dans le contexte de ce projet?”. S’il s’agit d’une amélioration graphique ou de détails qui n’affectent pas l’objectif principal, alors pas de problème. Dans le cas contraire c’est ennuyeux.

Imaginez un instant que vous venez de représenter un détail sans importance mais qui prend trop de notre attention (ex: trop de contraste dans un coin du dessin sans importance), croyez-vous qu’un individu normal ne critiquera pas ce détail bancal qui vient gêner la lecture? Ce que je sais bien du grand public, c’est que lorsque c’est bien fait, ça passe et c’est normal, mais lorsqu’il y a quelque chose qui ne fonctionne pas, il vous en fait la remarque rapidement! :)

 

dessin vignettes
Le dessin de vignette est le b.a-ba de toute image créative.

 

Bien sûr, pour remplir un objectif, il faut d’abord se le fixer. C’est pour cela que j’insiste sur le concept d’intention. Si vous n’avez aucune intention, aucun objectif, et que vous ne planifiez ou ne visualisez pas votre travail final avec un minimum d’avance, il est assez risqué de continuer. C’est donc pour cette raison qu’il est préférable de décomposer le développement de votre image en étapes, pour arriver à un résultat convenable sans prendre le risque d’être obligé de tout recommencer.

Ceci dit, cela ne vous empêche pas de dessiner un peu au hasard de temps à autre, histoire de vous défouler et de chercher une créativité spontanée… mais l’expérience m’a prouvé que les personnes ayant bien défini leur projet restent les plus productives et apprennent bien plus vite que les autres. C’est un fait! c’est réel! De plus, un projet bien défini produit de la motivation, de l’émulation et nous pousse à planifier et à faire des recherches au moment opportun plutôt que d’apprendre des choses dans le vide, pour devoir les réapprendre 2 ans plus tard.

Rappelez-vous toujours que sans objectif, le dessinateur n’est qu’une âme en peine, un électron libre qui finira, comme bon nombre d’apprentis, par abandonner avant même d’avoir commencé.

 

Exemple de technique pour économiser du travail et rester efficace

A l’occasion de ma dernière formation, j’ai pu montrer les étapes d’une scène inventée à partir d’une histoire que je me suis racontée au préalable. Le thème était: “dame nature rend visite à la famille renard”.

 

vignette dessin
L’étape 2 de la vignette était aussi grande que la paume de ma main.

 

Le projet était bien défini. L’histoire était réelle dans ma tête, je visualisais plutôt bien l’essentiel de la scène, même si certains aspects me semblaient encore flous. Après avoir posé des mots sur la scène, j’ai enchaîné sur le dessin de vignettes puis j’ai choisi celle qui me convenait le mieux dans la lecture graphique et la composition. J’ai ensuite développé une deuxième maquette un peu plus précise, puis j’ai pu passer à la recherche/prise de références pour m’aider à développer le décor et apporter un peu de réalisme aux protagonistes.

Vous noterez que dans les différentes étapes, je commence par une impression de valeurs, en intégrant 4 valeurs en plus de la valeur du papier semi-teinte.

J’ai d’abord posé les hautes lumières, là où la lumière du soleil tape directement. Ensuite j’ai indiqué les points focaux principaux, là où je désirais que l’attention du public se porte.

J’ai mis en évidence ces points rapidement en utilisant les valeurs les plus intenses que peuvent me procurer mes crayons (pierre noire dans ce cas), ce qui me permet d’arrêter mon travail de détail quand je le souhaite car l’essentiel a déjà été dessiné.

 

Illustration finale Formation dessin d'inspiration
Alors? trop de détails? pas assez de détails? En tout cas l’essentiel est décrit. La composition semble équilibrée et l’histoire est racontée correctement. J’ai peu contrasté les éléments du bord de l’image, pour ne pas que l’œil s’échappe sur les côtés.

 

Imaginons que cette image ait été destinée à un éditeur, il m’aurait été facile de respecter les délais même si le travail de finition n’était pas réellement terminé. Au moins l’essentiel est raconté, le reste (ex: la finition du décor) n’est que du bonus.

Vous remarquerez que mon décor, qui est plus ou moins détaillé, ne remet pas en question mon illustration en détournant l’attention inutilement. C’est d’ailleurs pour cette raison que ces zones sont davantage décontrastées, et si on prend le temps d’explorer un peu l’image, on se rend compte du travail sur les détails sans que cela dérange la lecture.

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51 réponses

  1. Merci pour ces conseils avisés que vous dispensez généreusement sur ce blog. J’enseigne moi-même le dessin depuis plusieurs années et j’y trouve de bonnes idées à transmettre à mes élèves.

    Cordialement

  2. Vraiment super cet article, ça me fait penser que Miles Davis a dii : Pourquoi jouer tant de notes alors qu’il suffit de jouer les meilleures ?, c’est exactement pareil en musique. Ou encore il a dit: “La véritable musique est le silence et toutes les notes ne font qu’encadrer ce silence.” on pourrait comparer le silence à la lumière…Merci Pit.

  3. Super sympa comme article !
    Un style de dessin de suggestion que j’adore c’est le dessin sur papier noir !
    J’en fais depuis quelques mois et c’est assez rapide à prendre en main : en quelques dixaines de minutes, on peut avoir un dessin impressionnant et bien finit !
    En plus, pour l’apprentissage des zones de lumières c’est le top je trouve !!

  4. Question économie de trait, suggestion et minimalisme on peut se référer à Hugo Pratt qui en trois lignes verticales et deux horizontales réalisait tout un paysage et des personnages. Et aussi Mike Mignola, peu de traits peu de couleurs, mais de l’expressivité à revendre.

  5. Je me sens tellement concernée! Je dessine souvent sans réfléchir et à la fin je ne suis pas satisfaite du résultat, je trouve toujours que mon dessin ne retranscrit pas ma pensée. Je vais travailler sérieusement tout ça. Merci pour ces précieux conseils Pit! Depuis que je lis tes articles j’ai fait des progrès et ça booste la motivation!

  6. Salut,je reçois souvent de tes messages que j’aime bien.je voudrai progresser en dessin mais avant je vais t’envoyer mes dessins de débutant pour que tu me fasses une appreciation si je peux continuer dans le dessin et les progrès à réaliser merci à bientôt

  7. toujours un super article !
    justement j’ai l’impression que dans mon cas ( même si c’est vrai que ça ne l’était pas avant, seulement depuis cette année où je dessine beaucoup plus ) je dessine vite mais avec très peu de détails, et les valeurs, eh bien par exemple dans le métro je les oublie^^
    je me dis de chercher à d’abord savoir dessiner le détail pour ensuite le suggérer avec plus de facilité, mais du coup est ce une bonne chose, ou je peux me laisser faire du ” vite fait” régulièrement ?

    1. quand tu dessines du croquis vivants, du vite fait te permet de saisir graphiquement ce que tu ne pourrais pas vraiment en plusieurs heures.
      Donc le mieux comme d’habitude, est d’équilibrer tes pratiques, d’un côté des croquis sur le vif, de l’autre des dessins plus fignolés.

  8. Bonjour Pit
    Je suis en plein travail d’apprentissage sur ton cours débutant. Mon défaut de toujours le détail !
    et je m’y perd. Je passe des heures sur un dessin. Même si le résultat me parait malgré tout pas si mal(un peu d’autosatisfaction ne fait pas de mal)je comprend avec cet article que c’est un gros point de progrès que j’ai là.
    Je m’applique à suivre le déroulement de ton cours débutant, il est très pédagogique.
    A bientôt
    Marc

    1. Merci pour ton retour Marc.
      Effectivement, l’économie est un point noir, même pour les professionnels je te rassure.
      Avec le temps et le recul, on peut parvenir à aller plus vite à l’essentiel, et y parvenir plus efficacement.
      Il faut faire confiance au temps et à la réflexion.
      Il est toujours bon de se poser des questions au dessus du papier, et ne pas se faire engloutir totalement dans le principe instinctif: “j’aurais mieux si je fais +”

  9. Très intéressant !
    Un précieux conseil à appliquer dans tellement de domaines !
    Je suis ravie du contenu ludique, clair et précis de la formation…qui va bien au delà du dessin
    Merci Pit, heureuse de faire partie du “groupe”
    Sandra M

  10. Je me retrouve dans plein d’idées soulevées dans l’article : le fait de voir tous les défauts de ces anciens dessins, la difficulté à savoir où s’arrêter. Merci pour ce bel approfondissement des idées.

  11. A quel moment s’arrêter pour éviter de trop en faire, mais aussi, comment détecter qu’il manque encore quelque chose de plus à notre dessin?

    Quand je fais mes crayonnés, j’y vais souvent au feeling. Il y a le dessin “plaisir”, comme le besoin de faire quelque chose. Et le dessin “projet”.

    Plus je te lis Pit, plus je prends conscience du long chemin qu’il me reste à parcourir.

    Quand je crayonne, je mets trop de coups de crayons, d’ailleurs parfois je demande à mon mari “tu en penses quoi?”, mais il a du mal à bien visualiser le dessin si je ne l’ai pas “nettoyé” au préalable. Je dessine par acoups / hachures, donc à cette étape j’en fais trop.
    Et pour autant, une fois le dessin mit au propre, colorisé, je le trouve plat. Il peut être techniquement réussit au niveau proportions et tout, mais il est lisse, sans “âme”.

    Je prends conscience que, même par plaisir, il faut essayer d’être juste dans nos dessins. Faire la vignette devrait être systhématique. Réfléchir à l’histoire qu’on veut raconter aussi. Je dois prendre de nouvelles habitudes quand je dessine.

    “Pourquoi pensez-vous que de nombreuses personnes procrastinent et finissent rarement leur projet… parce qu’elles ne se sont fixées aucun objectif précis!”

    Tu parles de moi là Pit XD
    j’ai plein de projets et j’en ai finis peu… pourtant je ne lâche pas l’affaire, j’en ai encore en tête, je peux les traîner des années durant, mais je ne me donne pas suffisemment le temps d’avancer.

    j’ai du boulot qui m’attend ^^’

    1. Je parle d’un bon nombre d’entre nous en réalité! :)
      Si tu t’es reconnue dans mes propos, je pense que c’est le cas de pas mal de lecteurs aussi.
      Il faut “simplement” y croire et ne jamais abandonner, dans tout ce qu’on fait dans la vie.

  12. Très bon article, comme d’habitude d’ailleurs !
    Je n’avais jamais vraiment considéré le nombre de traits ou de coup de brush comme important, mais depuis que j’ai appris cette méthode de vignettes dans une de tes formations pour décomposer le projet avant de commencer, je suis vraiment une autre dessinatrice et j’ai remarqué que mon travail avait beaucoup moins de traits qu’avant ! Au final préparer à l’avance permet d’éviter de perdre un temps précieux et de trop en faire, ou de se décourager avant la fin. Ca m’a complètement changé la vie et maintenant je sais où je vais avant même d’avoir attaqué et c’est super sécurisant. Je progresse à la vitesse de la lumière, alors merci pour tes précieux conseils!

  13. J’aime beaucoup le principe des vignettes qui permettent d’expérimenter à moindre frais.
    Surtout quand on a une idée dans la tête et pas le temps (boulot, sorties etc.) pour vraiment y réfléchir.
    Personnellement je trouve que ça encore mieux lorsque je laisse mes pensées dériver (en début d’aprèm par exemple ^^)

    Sinon je trouve que ce blog est très formateur, beau boulot!

  14. Très intéressant, et me montre tout le chemin que j’ai encore à parcourir! Mais je tiens mon pari, je dessine une heure tous les jours depuis maintenant un bon mois. Je ne sais pas si ça rejoint ton propos, mais le fait de me limiter à une heure fait que je dessine, sinon si je m’embarque sans me mettre de limites, je suis partie pour deux ou trois heures facile et comme je le sais, je ne le fais pas, vu qu’il y a tout le reste à faire. Bien sûr, je laisse la porte ouverte à des plages plus longues, au moins en théorie (ça ne m’est pas encore arrivé, je ne veux pas risquer de casser cet humble projet de revenir tous les jours sur le papier) et aussi, ça m’aide à tenter de finir un dessin sur un temps donné, donc à dessiner l’essentiel d’abord. Prochaine étape: photographier quelques uns de mes travaux pour les partager avec la communauté… ça viendre… (mon second prénom, c’est Tortue, mais il paraît que symboliquement, c’est un très bel animal ^^)

    1. En effet se fixer une limite de temps aide beaucoup pour progresser. Je surveille souvent l’heure quand je dessine, ce qui me permet de toujours rester “connecté” à ce que je fais, et rester un minimum spontané, car plus on fait durer et plus on s’endort sur son projet.
      j’ai hâte de voir ton travail Chantal! à bientôt :) :)

  15. Admiratif de cette facilité de visualiser l’imaginaire et surtout de le reproduire !!!!
    Des conseils et trucs&astuces auxquels on ne pensent pas systématiquement….
    B R A V O !!!! Pit !

    Jeff

    1. Merci Jeff!
      ce n’est pas vraiment facile et cela ne l’a jamais été en réalité!
      j’ai juste un peu d’expérience et une sacrée motivation. Ça me sauve!

  16. Oô grand Maître ! Bonjour ! J’ai reconnu “La Quête de l’Oiseau du Temps” qui faisait partie de mes meilleures ventes BD. Souvenirs souvenirs … Maître je ne copiais plus depuis 20 ans et des bananes mais j’ai cédé à la tentation narcissique de vérifier si j’étais encore capable de faire un dessin figuratif vu que ces derniers temps c’est du grand n’importe quoi ce que je fais. En 1h30 + ou – j’ai copié Walt Disney et Mickey justement en économisant mes coups de crayon HB parce que sinon ça devient vite un torchon. Donc je vous rejoins complètement dans cet article. Pour les autres points je ne suis pas compétente. Maintenant à la fin j’ai vite constaté que le nez était trop long mais bon comme vous dites mon Walt il me plaisait bien quand même. À la limite c’est Mickey qui ne me convenait pas. Merci de votre patience … et tout votre travail titanesque ;-) Bonjour à Océ

      1. Zut j’ai cru que j’avais raté mon envoi ! Grand Maître vous allez recevoir un autre commentaire ! Désolée Pour le dérangement et à bientôt :(

        1. Ne t’inquiète pas, les commentaires sont validés manuellement.
          Cela prend un peu de temps, et j’aime prendre mon temps pour répondre à tout le monde. :)

      2. lol si l’on parle des premiers coup de cœur certes Hergé est incontournable mais mes premier émois vont a Franquin qui n’est pas si ligne clair que ca surtout si on voit les originaux des idées noires

  17. Merci pour cet article très intéressant. En effet, je me noie souvent dans les détails sans savoir quand m’arrêter. Ces informations vont m’aider à mieux gérer mon travail. Merci Pit ?

  18. Ce qui est sûr c’est que tu n’as pas économisé tes mots pour nous expliquer tout ça.
    Si après cet article on continue à se perdre dans les détails c’est qu’il faut décidément passer à autre chose :)
    Merci Pit

    1. héhé en effet :)
      remarque j’aurais encore pu davantage développer et donner plus d’exemple.
      j’ai l’habitude de pondre des pavés encore plus gros que cela, huhu :) :)

    1. on croit toujours mieux faire en faisant plus, mais je crois que ces conseils s’appliquent dans quasi tous les domaines.
      merci à toi

  19. Oui!!! La plupart du temps je gâche mes croquis à cause de ça, je ne prévois pas assez ce que je veux privilégier dans ma page et commme je vois bien que le but n’est pas atteint je finis par tout remplir….pas de blanc ,pas de hiérarchie et beaucoup beaucoup trop de détails ! Merci pour ce tuto
    Fcse

  20. “En effet, rappelez vous d’un des premiers dessins que vous avez hachuré… y avait-il besoin d’autant de hachures?”
    Je me suis un peu senti visé là dedans. J’y vais souvent au feeling, mais parfois je veux trop en faire.
    En revanche je me vois mal compter mes coups de crayon, sans compter les coups de gomme encore trop fréquent…
    Très intéressant les étapes de ton illustration.

  21. À nouveau un article intéressant! Le concept d’économie est aussi utilisé dans la communication écrite. Un bon rédacteur fait l’économie des mots comme le bon dessinateur fait l’économie des détails. Dans les 2 cas, c’est difficile, car on doit réfléchir à chacun des mots ou à chaque trait de crayon ou étape.

    1. J’apprécie chaque fois vos communiqués ..
      Tout y est enrichissant , et vos traits d’humour sentis .
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      Merci pour votre participation à enchanter le monde , MI

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